ui n' a rêvé pour peu qu'un de ces objets lui soit tombé entre les mains - à la lecture d'un programme du Gaumont Palace, de faire un imaginaire grand saut en arrière et, dans la foule murmurante massée sur le terre-plein de la place Clichy, d'entrer à son tour dans le - vieil Hippodrome, voué depuis 1910 au cinématographe ?
C'est un peu ce rêve-là que nous avons voulu réaliser pour le public parisien de 1991 en imaginant ce programme. Bien sûr, il y manque peut être l'essentiel : ce fantastique vaisseau qui sombra en 1972, à la consternation des amants du cinéma ; mais le Théâtre des Champs Elysées des frères Perret, lieu du rendez-vous, nous a semblé être le meilleur coup de chapeau architectural à la mémoire du vieux mammouth disparu.
Les films nous restent. Et, quoiqu'on dise, nombreux. Que choisir dans cette masse ? Et comment choisir ? A la solution qui aurait consisté à reconstituer purement et simplement un authentique programme, nous avons préféré celle d'une séance synthétique, un ensemble qui reflète la diversité et les tendances propres à la firme. Il fallait aussi opter pour une tranche temporelle : nous avons décidé que nous n'irions pas au-delà de 1913, moment où l'exploitation bascule vers le long métrage et la manie du feuilleton. Il s'agissait de présenter des oeuvres complètes, et dans une version conforme en tous points à l'original. Ainsi est né ce programme hommage aux Années d'Or de la production de Léon Gaumont et de ses réalisateurs fétiches. Ces films sont projetés à leur vitesse initiale, dans un teintage d'origine. Ils sont accompagnés par la musique retrouvée, orchestrée et dirigée par Jean-François Zygel.
Certains d'eux bénéficient en outre des charmes de la coloration au pochoir, qu'elle soit originelle, comme pour Héliogabale, ou reconstituée, comme pour Le Peintre néo-impressionniste, rendu à sa polychromie native.
Enfin, en hommage particulier à Léon Gaumont, cet homme qui ne concevait pas le cinématographe sans la couleur et le son, nous présentons trois minutes réalisées en 1906 par Alice Guy, une phonoscène interprétée par Félix Mayol. Là se conjuguent les moyens les plus modernes de l'analyse sonore et l'artisanat retrouvé de l'antique pigmentation au pochoir...
Mesdames, Messieurs, l'orchestre s'accorde. Il va attaquer l'ouverture. Veuillez gagner vos places. Et que la fête commence !
Pierre Philippe.
FELIX MAYOL Négatif conservé
par la Cinémathèque Gaumont Le plus célèbre des chanteurs de la "Belle Epoque" enregistre aux Buttes-Chaumont, en 1906 et sous la direction d'Alice Guy, une grande partie de son répertoire. Devant le drapé d'un rideau fleuri de muguet - sa fleur fétiche - Félix Mayol chante l'une de ces grivoiseries qui faisaient les délices des spectateurs de la "Scala" et, bien entendu, du "Gaumont-Palace".
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Actualites
A partir de l'automne 1910, Gaumont
édite un journal filmé hebdomadaire qui ne cessera
qu'en 1975. La "Gaumont's touch", cet appétit
du réel qui caractérise toute la production de
la firme, trouve ici son accomplissement. Ces morceaux choisis
en témoignent qui captent avec la même photogénie
les péripéties d'un fait-divers célèbre
ou les dernières créations de la mode parisienne.
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Le
Tic Un comique primitif la traditionnelle poursuite accumulative - qui en dépasse les données par la magie de ses images, captées dans la vie réelle. Derrière le prétexte, savoureux, d'un tic dévastateur, des tableaux de la vie quotidienne : badauds et pierreuses de Belleville, élégantes de l'esplanade des Invalides sorties d'une toile de Caillebotte, et le Paris de l'an 1908.
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Le Railway de la Mort "SCENE DE L'OUEST AMERICAIN" Joe Hamman, rentré depuis peu des Etats-Unis, implante en France un genre nouveau, que l'on n'appelle pas encore le western. Scénariste et acteur sous la direction (le son ami Jean Durand, il transforme la Camargue en Arkansas pour y poursuivre un rêve aventureux. La superbe photogénie des opérateurs Gaumont et le montage déjà haletant d'un des meilleurs cinéastes français des années dix.
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Le Peintre néo-impressionniste Négatif conservé
par la Cinémathèque Gaumont Emile Cohl, le "bénédictin" de Léon Gaumont, travaille d'arrache-pied à la meilleure partie de son oeuvre, dès 1910, chez Gaumont. Ce film, qui témoigne de son passé proche d '"Incohérent", mélange harmonieusement ses ambitions de satiriste raffiné et sa volonté d'amuser le grand public, suivant les volontés du patron. L'un des chefs-d'oeuvre de l'inventeur de l'art du dessin-animé.
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Héliogabale Avec la même autorité souveraine, Louis Feuillade tourne chez Gaumont films comiques, mélodrames, "scènes de la vie réelle" et grandes reconstitutions historiques inspirées du cinéma italien, comme ces tableaux "décadents" où le jeu de Luitz Morat n'est pas sans rappeler celui de Sarah Bernhardt et des diva transalpines. Les lions de la ménagerie des Buttes et le charme kitsch de la couleur au pochoir.
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Jeux
d'enfants
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Onésime se marie...
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